DOSSIERS
« Nous
sommes en outre ce qu’ils ne sont pas : des révoltés de toutes les heures,
des hommes vraiment sans dieu, sans maîtres, sans patrie, les ennemis
irréconciliables de tout despotisme, moral ou matériel, individuel et
collectif, c'est-à-dire des lois et des dictatures (y compris celle du
prolétariat) et les amants passionnés de la culture de soi-même » Fernand Pelloutier - lettre aux anarchistes
Moshé ZALCMAN « ouvrier
juif et communiste au temps de Staline »
Extraits de « La véridique histoire de Moshé, ouvrier
juif et communiste au temps de Staline »,
traduit du Yiddish par Haliva Edelstein, Editions Encres-Recherches 1977
d’après les notes de lecture de Michel Naud publiées dans l’anarcho-syndicaliste
Ouvrier
tailleur Moshé Zalcman fut exilé de Pologne pour
activité révolutionnaire et s’installa en France. Après la révolution
d’Octobre, il part pour l’Ukraine soviétique pour servir la révolution comme
ouvrier tailleur à l’usine Gorki au centre de Kiev. Il est élu au comité de
fabrique. Poursuivi pour ses opinions, il sera arrêté, torturé, déporté sans
jugement en 1937 en Sibérie, réhabilité en 1956 en raison « d’absence de
corps du délit » et aura la chance de pouvoir rentre en France, toujours
comme tailleur, toujours communiste, dans le quartier de la rue des rosiers.
Il
est également l’auteur d’une biographie
de Joseph EPSTEIN qui est issu du même schtetl que lui ( et que Rosa
LUXEMBURG ) en Pologne.
Page 94
« Notre comité syndical était submergé de tâches:
travail administratif de première nécessité, contrôle sanitaire, gestion des
crèches, des garderies et des maisons de repos, versements financiers divers,
vérification de la liste des malades, surveillance de la cuisine de la cantine,
réception des rations alimentaires. En outre, le comité aidait les ouvriers à
trouver un logement, fournissait des billets gratuits pour le théâtre,
distribuait des repas aux écoliers, des layettes aux nouveau-nés et organisait
des caisses de secours. Mais le rôle principal d’un syndicat, qui consiste à
revendiquer pour le travailleur un juste salaire sans être astreint à une
norme, bref à défendre les intérêts du travailleur, ce rôle n’était pas assumé
par notre comité syndical, ni par aucun autre dans ce pays. »
Page 104
« Je participais à une assemblée du Soviet du secteur
Leninski, dont relevait notre fabrique, assemblée qui
devait examiner la question du ravitaillement dans les écoles. J’y pris la
parole et je dis : « Si nous, les
adultes, avons à subir des privations et des difficultés à cause de la
construction du socialisme, c’est normal, car nous travaillons pour l’avenir,
mais nos enfants ne doivent pas souffrir de discrimination : l’enfant d’un chef
et l’enfant d’un ouvrier doivent être nourris de la même façon ». A
peine eus-je finis qu’on m’attaqua de toutes parts. On cria que j’avais
l’esprit mal tourné, que je faisais la politique des opportunistes, et
finalement, que mon intervention tenait du pur trotskisme. Devant cette
dernière déclaration, les camarades prirent peur pour moi : le trotskisme était
la plus grave accusation. »
Il s’en
sortit cette fois-ci en disant que la traduction du yiddish en russe avait été
mal faite.